Par David Xoual

Jusqu’au 29 janvier 2023, le Musée d’Art et d’Histoire de l’Hôpital Sainte-Anne met en lumière une artiste aussi singulière que méconnue : Corinne Deville. Et pour cause, elle n’a jamais souhaité exposer ses œuvres.

Des œuvres qu’elle destinait à sa famille et ses proches, des peintures au carrefour de l’art brut et de l’art naïf. Soit une autodidacte comme l’aurait décrit le milieu, formule facile et complaisante alors que l’œuvre de Corinne Deville est loin d’être dénuée de culture artistique et de profondeur. Corinne Deville, ce sont avant tout des tableaux emplis de couleurs vives où cohabitent bestiaire fantasmé, atmosphère pastorale et folklore régional. Une œuvre picturale comme un refuge intérieur et un pansement sur son enfance dans les Ardennes marquée par la guerre et des parents-artistes, reconnus et distants. Née en en 1930 dans le village de Montcy-Saint-Pierre, Corinne Deville se fait la malle à 17 ans quand, lors d’un séjour à Chamonix, elle rencontre son futur mari, Jean Taittinger. Ils auront cinq enfants, lui deviendra Garde des Sceaux et maire de Reims pendant 18 ans. A la solitude d’être l’épouse d’un homme politique, Corinne Deville répond par une soif insatiable de créer. Une vie en peinture qui ne la quittera plus. Chaque jour, c’est sur sa petite table de 45 cm sur 35 qu’elle exprime ses paysages intérieurs. Son mari, son héros, sa peur d’être délaissée, ses enfants, la Suisse idéalisée, des moments de vie comme le 14 juillet ou la Saint-Nicolas… Ses tableaux mêlent textes et images, invitent le public à explorer la psyché d’une femme pleine de vie et pétrie d’angoisse. Corinne Deville, ce sont également d’étonnantes créations comme ses locomotives fabriquées à partir d’objets du quotidien dans la lignée de l’art brut. Boites de thé, étuis à cigares, plaques d’immatriculation… Corinne Deville peut passer des heures à quatre pattes pour concevoir ses trains, synonymes d’évasion et de contrées lointaines, elle, qui n’aimait pas voyager si ce n’est pour rejoindre la Suisse où elle s’est éteinte en 2021. 

Vivre en peinture, Corinne Deville (1930 – 2021), du 17 septembre 2022 au 29 janvier 2023, au Musée d’Art et d’Histoire de l’Hôpital Sainte-Anne

INFOS : https://musee.mahhsa.fr/