Méconnu en Occident, Yasuke est une véritable légende au pays du Soleil-Levant. Il faut dire que l’histoire de cet esclave africain devenu samouraï au Japon a de quoi fasciner. Oubliez les héros costumés des studios Marvel, ici la réalité sublime la fiction. 

Peu de choses nous sont parvenues de cet homme au destin exceptionnel. De lui, on ne connait que son patronyme japonais, à savoir Yasuke ou Kurusan (Kuru : noir). Il serait né sur la côte Est de l’Afrique, peut-être au niveau de l’actuel Mozambique, dans les années 1530. Alors qu’il chasse le lion, le futur Yasuke est capturé par des marchands d’esclaves. Direction Goa où il découvre la cruauté de la traite négrière. Là-bas, Yasuke est condamné au mythe de Sisyphe, version porteur d’eau. Du matin au soir, l’esclave fait le chemin entre la rivière et les jarres de son maitre. Epuisé et humilié, il pense au suicide quand arrive une délégation d’ecclésiastiques. Parmi eux, un jésuite italien du nom d’Alessandro Valignano qui cherche un homme fort pour assurer sa protection au Japon. Yasuke sera son homme, enfin, son esclave. Après un voyage de deux ans, ils débarquent au Japon en 1579. A l’autre bout du monde, Yasuke fascine les foules, et le religieux en profite pour l’exhiber contre de l’argent. On assiste à de véritables scènes d’émeutes tant les Japonais veulent approcher cet homme si différent d’eux. Loin des préjugés raciaux, ils sont principalement impressionnés par sa taille et sa force. Les habitants n’hésitent pas à parcourir des centaines de kilomètres pour le rencontrer. Au fil des années, le maitre et son esclave poursuivent leurs pérégrinations à travers le Japon. C’est à Kyoto que Yasuke fait une rencontre décisive en la personne d’Oda Nobunaga. Subjugué par son intelligence (Yasuke parle japonais) et sa puissance, le seigneur de guerre souhaite conserver Yasuke au Japon. Le père Alessandro Valignano accepte. Le destin de Yasuke bascule. Elevé au rang de samouraï, il est libéré et devient l’un des protecteurs d’Oda Nobunaga. Il fait même parti de son premier cercle. Dans Kyoto, Yasuke déambule désormais avec deux sabres et la propre arme du seigneur de guerre. « Un privilège exceptionnel pour l’époque », selon Serge Bilé, auteur de l’excellent ouvrage Yasuke Le samouraï noir. Yasuke prendra part à de nombreuses batailles avant que l’on perde sa trace. Est-il resté au Japon ? Nul ne le sait. 

Yasuke Le samouraï noir, Serge Bilé, Owen Publishing

Par David Xoual

Illustration Samuel De Montbron