Consommer local est plus que jamais d’actualité. À Lyon, un brasseur souhaite créer une microbrasserie de quartier : la microbrasserie de Montchat. Depuis plus d’un an, Christian Goineau brasse déjà une première gamme de 6 bières, par lots de 30 litres. Aujourd’hui, il compte développer son offre en aménageant son hangar en brasserie. Au programme, plusieurs objectifs : favoriser le lien social, créer un lieu d’apprentissage, promouvoir une production la plus écologique et locale possible. D’ailleurs, Christian Goineau espère obtenir plus tard le label « Lyon, Ville équitable et durable ». À l’heure où nous écrivons ces lignes, sa campagne de financement Zeste atteint près de 10 000 €.

les premières bières

Feat-Y : Pourquoi ouvrir une microbrasserie ?

Christian Goineau : J’étais déjà brasseur amateur, par plaisir ! Je souhaitais ouvrir une microbrasserie en 2018, mais je n’en avais pas encore l’opportunité. Après un licenciement économique, j’ai suivi en juin 2019 une formation de brasseur de 120 heures à l’IFBM de Nancy. Par la suite, j’ai pu compter sur la chambre des métiers et de l’artisanat de Lyon pour lancer mon projet.

Feat-Y : L’aventure a débuté avec une salle à brasser d’occasion. Comment l’avez-vous trouvée ?

C.G. : Grâce à mon beau-père ! Il avait vu sur les réseaux sociaux que le bar grenoblois « Une petite mousse » vendait sa salle à brasser. Ainsi, j’ai récupéré un matériel d’occasion qui m’a permis d’abaisser le coût global de mon projet et de faciliter l’obtention du prêt.

Feat-Y : L’aspect local occupe une très grande partie de ce projet. D’ailleurs, le nom de la microbrasserie et des bières s’inspire directement de votre emplacement, entre le quartier de Montchat et Monplaisir.

C.G. : Oui ! Je souhaite créer une brasserie de quartier, comme il en existait avant la Première Guerre mondiale. Ce choix s’explique aussi par ma recherche d’authenticité. Selon moi, occuper un tel métier, c’est avant tout avoir une place dans la société et un impact particulier dans la vie des gens.

Feat-Y : En quoi cette brasserie est-elle écologique ?

C.G. : La microbrasserie consommera le moins d’énergie possible. Les fermenteurs et la chambre froide sont isolés, et la toiture a été refaite avec 30 centimètres de ouate de cellulose, pour ne pas surchauffer l’été et obtenir une température constante l’hiver. De plus, tout est imaginé pour pouvoir réutiliser de l’eau pluviale dans le processus ! Nous comptons aussi bénéficier de l’énergie solaire grâce à des panneaux photovoltaïques. Enfin, un peu plus tard, je souhaite faire de la récupération d’énergie sur les groupes froids.

Feat-Y : D’où viennent les matières premières ?

C.G. : Les matières premières de cette gamme sont made in France. Leur très bonne qualité est indispensable pour le goût et la tenue de la mousse. L’objectif de la microbrasserie est de se fournir auprès de lieux de production proches géographiquement, comme avec La Houblonnerie, une coopérative alsacienne qui propose des houblons bio. Quant au malt, lui aussi est bio. Je vais travailler avec la malterie « À vos malts », qui vient d’ouvrir à Romans-sur-Isère. Elle a été créée sous l’impulsion de Jean Girardeau, qui a développé une technique de brassage spécifique après avoir suivi des formations tout autour du monde.

Feat-Y : Chaque bière conçue jusqu’à présent a une spécificité bien particulière. Comment êtes-vous parvenu à trouver des accords mets/bières ?

C.G. : Je me suis inspiré de livres, notamment de l’ouvrage Les saveurs gastronomiques de la bière, par David Lévesque et Martin Thibault. Différents sites internet m’ont également été conseillés pour réaliser des accords bières/fromages. J’ai aussi organisé des dégustations avec des amis, et depuis mars 2020, je suis en phase de tests. Cela m’a permis de reproduire mes bières au moins cinq fois, afin d’affiner le produit en ajoutant un peu plus de céréales, ou bien en travaillant avec différents houblons, etc. Auparavant, je n’avais pas de houblon français. C’est désormais le cas : j’ai donc pu réadapter mes recettes.

Feat-Y : Qu’en est-il du conditionnement ?

C.G. : Il sera réalisé grâce à des fûts en inox, conçus par le fabricant Maison Neuve, en Normandie. La fabrication des bouteilles en 33 cl et en 75 cl est française. Elles sont issues de Rebooteille, une entreprise de recyclage de bouteilles, qui me donne une forme particulière de bouteilles. On m’a également conseillé de travailler avec un imprimeur utilisant des bouteilles avec une coque spéciale. L’objectif étant de fournir des étiquettes facilement détachables sous l’eau. À terme, les bouteilles seront consignées. Qui plus est, des growlers d’un litre sont disponibles à la brasserie : il s’agit de bouteilles réutilisables, achetées par les clients. Cela permet de se procurer de la bière « en vrac », puisque ces récipients sont remplis directement sur place, par un système de contre pression. La bouteille est remplie en CO2, en bière, puis encapsulée sans entrer en contact avec l’oxygène : de la sorte, la bière n’est pas altérée ni oxydée, et peut être conservée durant 45 jours.

Feat-Y : Outre la commercialisation des bières, cet endroit a également pour vocation de proposer un atelier de brassage pédagogique dès septembre 2021. Pouvez-vous nous en dire plus ?

C.G. : Il aura lieu une fois par mois, le samedi après-midi ! Les visiteurs (deux équipes de trois personnes) seront invités à se questionner sur le style de bière qu’ils souhaitent concevoir : ils pourront faire leur choix parmi une quinzaine de bières. Tout d’abord, un petit écran leur expliquera les étapes du brassage. Les fermenteurs professionnels pourront être utilisés pour produire différents types de bières, notamment si elles doivent être travaillées à des températures très basses. L’objectif de cet atelier sera de présenter les différentes céréales selon les types de bières ! Une dégustation bières/fromages sera réalisée durant la phase d’ébullition des bières. Celles-ci seront ensuite fermentées, et deux mois plus tard, les participants pourront venir récupérer leurs bières, déjà embouteillées et étiquetées.

Feat-Y : Prévoyez-vous d’autres animations ?

C.G. : Oui ! Les activités annexes débuteront en juillet 2021. Il y a aura une visite de la brasserie, une découverte des matières premières poussant autour de ce lieu (houblon, orge, blé, avoine et seigle), puis une dégustation. Ce rendez-vous sera organisé une fois par mois, là encore le samedi, en fin d’après-midi. Par ailleurs, des kits de dégustation ludiques seront disponibles sur le site internet. Une fois récupérés à la brasserie, il suffira de suivre les instructions fournies pour découvrir les accords bières/fromages. Ce kit renfermera un petit support de notation, afin que les gens écrivent ce qu’ils ressentent en termes de goût ou d’odeur. À la fin de la dégustation, ils pourront comparer leurs réponses à une fiche recensant toutes les informations sur les bières commandées.

Propos recueillis par Mélanie Domergue

Infos :

Pour accéder à la page Zeste de ce projet : https://www.zeste.coop/fr/microbrasserie-de-montchat

internet : https://bieredemontchat.com/