Par David Xoual

Ce fut la première fois que la photographe Paz Errázuriz fut l’objet d’une grande exposition en France.
Il était temps. Tant l’œuvre de l’artiste née à Santiago en 1944 foisonne d’idées et d’humanisme.
Tout commence dans les années 70 sur les bancs de l’école où Paz, alors institutrice, prend ses élèves
en photo, tire le portrait de leurs familles. Les gens, voilà ce qui intéresse Paz Errázuriz. Le coup
d’Etat signe l’arrêt de la carrière d’enseignante de Paz qui décide de se consacrer à la photographie.
Une bonne chose au milieu des décombres et des cadavres. Paz s’engage, se fait la porte-parole des
sans voix et des invisibles, des quidams en marge de la société chilienne. Chez elle, point de modèles,
mais des hommes et des femmes, des histoires, des amitiés naissent au gré de ces rencontres. Elle
passe beaucoup de temps avec ses sujets, partagent leur quotidien. Il y aura les femmes courageuses
du village guatémaltèque de Sepur Zarco qui se sont opposées à la guérilla, les gens qui dorment
dans la rue (série Los Dormidos), les gens du cirque, les lutteurs et les boxeurs… Paz Errázuriz n’a
peur de rien, franchit le Rubicon, explore des milieux interlopes et interdits. La Manzana de Adán
dans les années 80 met en lumière la communauté des travestis prostitués. Une véritable plongée
sans voyeurisme dans le quotidien de ces hommes et de ces femmes en train de se maquiller ou en
balade. La bienveillance et la douceur des regards tranchent avec le décorum, la misère des
conditions de vie. Chez Paz Errázuriz, les sujets vous sourient, vous regardent droit dans les yeux,
affichent leurs singularités et leur fierté. Bouleversant.

https://www.pazerrazuriz.com/