Par david Xoual

Gérard Fulmard ou quand la vie normale d’un quidam rencontre la ligne claire de Jean Echenoz. Soit
un ancien steward en proie à l’ennui devenu homme de main pour un parti politique obscure. Les
gens ne lisent plus, les auteurs continuent d’écrire et s’amusent….
Il suffit de peu, il suffit d’une chute suicidaire rue Erlanger le 25 avril 1975 pour que Jean Echenoz
nous fasse la topographie de cette rue du 16 ème arrondissement. Là où Mike Brant a décidé de mourir
en se jetant par la fenêtre tandis que la mère de notre personnage principal poussait son caddie. Des
années plus tard, Gérard Fulmar habite toujours dans l’appartement de sa mère, rue Erlanger. Il
végète, vole les magazines de ses voisins, regarde les chaines d’info en continu où l’on évoque la
mystérieuse explosion du supermarché voisin. Gérard Fulmard s’ennuie dans sa vie minuscule, il
décide de monter le Cabinet Fulmard Assistance. Et rêve d’une secrétaire pimpante et pulpeuse.
Primo, il lui faut une plaque comme celle des médecins et des notaires. Que va-t-il faire dans ce
cabinet improvisé ? Un peu près tout jusqu’à ce qu’on vienne lui proposer de jouer les détectives
pour le compte d’un mouvement politique mineur où règne la confusion et les coups bas. Un parti
qui pourrait s’apparenter à l’extrême droite ou bien plus à gauche. Peu importe. L’important est
ailleurs dans cet anti-polar où chaque phrase semble avoir été travaillée à la manière d’une
dentelière de Calais. De la rue Erlanger, on bifurque vers les oasis protégées de l’Ouest parisien. C’est
ici qu’évoluent la plupart des membres du parti politique. Les voitures de luxe ronronnent, les
jardiniers s’activent, les propriétaires font des longueurs dans leur piscine. Allez savoir pourquoi,
l’auteur nous convie ensuite dans un palace en Asie du Sud-Est avec une scène mémorable digne des
Dents de la mer. Pendant ce temps Gérard Fulmard poursuit son enquête, s’essaye à la filature…
Homme sans qualités et sans culture, le personnage imaginé par Jean Echenoz n’est pas dénué d’une
certaine bonhommie. On l’aime malgré tout. Il nous ressemble. En dépit de sa bêtise et de sa vie sans
saveur, Gérard Fulmard conserve l’espoir de trouver un sens et sa place dans ce grand chaos.



Vie de Gérard Fulmard, Jean Echenoz, éditions de Minuit