Après 2007 et 2018, Régis Jauffret remet le couvert avec le troisième tome de ses micro-histoires à la première personne : Microfictions 2022. Soit 500 nouvelles d’une page et demie où son art de la concision et son sens du détail croquent la noirceur de l’âme humaine.

Les Japonais ont le haïku, les Français Régis Jauffret et ses Microfictions devenues au fil du temps un incontournable des librairies. Comme toujours, l’auteur de La ballade de Rikers Island fait dans le gore, le noir c’est noir, sans espoir mais avec une touche d’humour (noir). Pour cette cuvée 2022, Jauffret réunit une nouvelle fois 500 personna-JE au bord du gouffre financier, au dernier stade de la chimio et bien plus encore. Des archétypes – toxico, mendiant, pétainiste, migrant, transgenre – à qui la vie minuscule n’a pas fait de cadeau et beaucoup de crasse façon rubrique faits-divers. Parricide, inceste, accident de la route, infanticide, agression à l’acide sulfurique… L’inventaire à la Jauffret lorgne plus du côté de chez drame que des jeunes filles en fleurs. Les infirmières sont traquées, les hygiénistes contaminés. Le confinement est passé par là. Quand on ne dort pas dans « un box aménagé en studio », on habite des tours, les pièces sont si exiguës qu’on peut toucher les murs de son lit. Les phrases, elles-aussi, sont courtes, incisives et tranchantes comme la lame d’un couteau. Pour l’auteur, cette forme brève est l’essence même de la littérature : « J’aurais même pu n’écrire que ça toute ma vie. À l’opposé d’une discipline que je m’imposerais, c’est la manière la plus naturelle pour moi d’écrire. Je pense même que quelqu’un qui, sans expérience, se mettrait au travail serait capable d’obtenir en une page et demie quelque chose qui ressemblerait à une microfiction. Ce format d’histoire est en effet la chose la plus naturelle qui soit. » 


Microfictions 2022, Régis Jauffret, Editions Gallimard

Par David Xoual