Le taux d’épargne en France des ménages, habituellement élevé parmi les pays développés, a grimpé avec la crise sanitaire, en raison notamment du confinement du printemps 2020. Mais est-ce que cette épargne est utilisée à bon escient contre le réchauffement climatique ? Non, estime Joseph Choueifaty, fondateur de Goodvest, qui indique dans l’entretien accordé à Feat-Y que sa société, fondée en cette année 2021, fournit des placements d’épargne plus rémunérateurs que ceux venant des banques traditionnelles. De même qu’il affirme que Goodvest permet de financer des entreprises qui se mettent en conformité avec l’accord de Paris pour le climat signé en 2015, en mesurant leur empreinte carbone directe et indirecte pour savoir si elles sont crédibles. Interview.

Feat-Y : Comment est venue l’idée de fonder Goodvest ?

Joseph Choueifaty : On est parti d’un constat assez simple, mais méconnu. C’est que l’épargne en France est toujours très carbonée, massivement investie dans les énergies fossiles. Et on l’ignore parce qu’en fait le système d’investissement et d’épargne en France est très opaque, à la fois en termes d’investissement et en termes de tarification d’ailleurs.

Feat-Y : La France est un des pays affichant un taux d’épargne important du revenu des ménages. Considérez-vous que jusqu’à présent, cette épargne a été bien investie (ou non) par les ménages ? Et pourquoi pensez-vous cela ? 

J.C : Déjà, l’épargne des Français est très peu investie. Aujourd’hui, elle est principalement sur des fonds en euros, qui sont surtout tournés vers des obligations d’État garanties. C’est de l’investissement très sécurisé qui ne permet pas de protéger contre l’inflation, parce que les rendements sont très faibles, ou sur des livrets. Il y a une très faible partie qui est vraiment investie dans l’économie réelle.

Et pourquoi ? Il y a plusieurs raisons qui permettent de l’expliquer. D’abord, il y a une faible éducation financière en France. On n’enseigne pas trop la finance, l’économie, l’investissement au lycée. C’est plutôt dans certaines études supérieures. Ensuite, le système est très opaque. Les banques infantilisent un peu les clients, sans leur expliquer. Du coup, il y a une certaine méfiance. Les épargnants français n’ont pas spécialement envie de s’intéresser à l’investissement parce qu’ils voient cela comme quelque chose de compliqué. Alors, il faut faire beaucoup de pédagogie pour les rassurer et leur permettre d’investir. Ce qui est très important. Il y a des études qui sont sorties récemment sur le développement du patrimoine des Français par rapport aux autres pays en 2020. On est très à la traîne par rapport aux Américains, aux Allemands, parce que les Français investissent très peu.

« Les entreprises qui sont dans les énergies renouvelables se développent beaucoup plus que celles dans les énergies fossiles »

Joseph Choueifaty

Feat-Y : Est-ce qu’avec la crise sanitaire, qui a incité les ménages à faire une épargne « forcée » en 2020, avez-vous observé une arrivée de nouveaux épargnants chez Goodvest et quels sont les retours qui vous ont été rapportés ?

J.C : Goodvest est live depuis septembre. On n’a pas tellement pu suivre d’évolution sur la durée. Mais les épargnants se sont davantage intéressés à l’investissement parce qu’ils ont plus de temps durant le confinement et ils avaient une épargne forcée. Surtout, on est une solution d’épargne qui est 100% en ligne. Le Covid a incité les épargnants à s’intéresser aux solutions d’épargne en ligne, plutôt que les solutions traditionnelles, historiques, bancaires. En plus de cela, on a une prise de conscience environnementale qui était assez forte durant le Covid, qui s’est accélérée vivement depuis. On parle de plus en plus d’investir responsable. Malheureusement, il y a beaucoup de greenwashing. Il faut être très précautionneux, comme dans toute chose. C’est pareil dans les transports, dans le vestimentaire. Mais c’est particulièrement le cas dans l’investissement responsable.

Feat-Y : Est-ce que vous exigez des engagements éthiques et écologiques auprès d’entreprises souhaitant être financées via vos épargnants ? Si oui, avec quels objectifs ?

J.C : On sélectionne des entreprises en fonction de plusieurs critères. Déjà, on a des critères d’exclusion assez simples. On exclut toutes les énergies fossiles. Aussi bien l’extraction que la production ; aussi bien le charbon que le gaz ou le pétrole. On exclut aussi le tabac, l’armement, toute entreprise qui viole le pacte des Nations unies, le divertissement pour adultes. En outre, on a fait un partenariat avec Carbon4 finance, qui fait partie de Carbone 4, cocréé par Jean-Marc Jancovici, qui nous fournit l’empreinte carbone des entreprises, aussi bien leur empreinte carbone directe qu’indirecte. C’est très important de prendre en compte l’empreinte carbone indirecte également, parce que sinon des entreprises comme Total ou Renault se retrouvent assez responsables parce qu’en fait, ce n’est pas l’extraction qui pollue le plus, mais c’est la consommation par l’utilisateur final. On a toutes ces données-là qui nous permettent de faire des portefeuilles d’épargne entièrement compatibles avec l’accord de Paris. Ce qui est une première mondiale ! On est les seuls à prendre en compte les émissions de CO2, aussi bien directes ou indirectes, des entreprises, pour faire des portefeuilles d’épargne. Ce sont nos principaux critères.

Feat-Y : Comment Goodvest certifie l’utilité éthique et écologique des placements proposés ?

J.C : Aujourd’hui, l’épargne des Français a plutôt une trajectoire de 4°C de réchauffement climatique parce qu’elle est massivement investie dans les énergies fossiles, aussi bien via les actions que via les obligations. L’argent dans les banques des Français, via leurs investissements, finance le réchauffement climatique. Chez Goodvest, on assure d’éviter cela parce qu’on exclut toutes les énergies fossiles et nous ne finançons que des entreprises qui sont compatibles avec une trajectoire de 2°C de réchauffement climatique. D’ailleurs, notre objectif est de réduire cette trajectoire à 1,5°C les portefeuilles. Mais on veut aller encore plus loin. On a une analyse ISR en interne qui analyse en permanence les entreprises et puis on met à jour régulièrement notre sélection pour l’affiner, être de plus en plus exigeant. Par exemple, en 2022, on va intégrer un nouveau critère, en plus de l’empreinte carbone. On va intégrer un critère de biodiversité qui va nous permettre de savoir combien d’espèces animales et végétales sont menacées par les entreprises, pour réduire au maximum le nombre d’espèces menacées.

@Goodvest

Feat-Y : Comment Goodvest peut convaincre des ménages de se tourner vers un investissement plus viable au niveau éthique et écologique ?

J.C : Déjà, il faut se demander pourquoi on épargne. C’est pour financer notre retraite, pour financer un achat d’appartement, pour financer notre avenir. C’est une grosse contradiction de financer des entreprises qui vont détruire notre avenir. C’est compliqué quand on parle de ménages. Souvent, quand on en parle, on parle de familles, puis d’enfants. On ne peut pas mettre de côté de l’argent pour nos enfants et en même temps détruire notre futur. C’est pour ces raisons-là que nos clients viennent. C’est qu’ils ont une sensibilité environnementale. Ils investissent pour le futur. Autant financer un futur dans lequel ils ont envie de vivre.      

En plus de les convaincre, des dimensions sociales et de transparence, on est très compétitif sur la tarification. On a souvent de meilleures performances que nos concurrents puisqu’investir de manière responsable ne détériore pas la performance. Bien au contraire. On investit dans des entreprises qui sont résilientes, préparées pour l’avenir. Les entreprises qui sont dans les énergies renouvelables se développent beaucoup plus que celles dans les énergies fossiles. Ça fait partie des raisons qui font choisir Goodvest auprès des épargnants. Mais aussi la simplicité. L’inscription se fait en 15 minutes sur Internet, avec la possibilité soit d’être autonome, soit de prendre rendez-vous et d’être accompagné par un membre de notre équipe.

Feat-Y : Qu’est-ce qui permet aux placements proposés par votre société d’être plus efficaces que le Livret A, produit d’épargne populaire en France, au niveau économique, social et écologique ?

J.C : Déjà, le Livret A n’a pas pour vocation de financer la transition écologique. Il y a une partie qui est investie pour financer des HLM. On peut considérer, à la limite, qu’il y a une partie qui est solidaire. Et encore, je pense qu’on peut faire mieux en matière de logements que les HLM, qui ne sont souvent pas en très bon état. Le Livret A n’a pas grand-chose de responsable. D’ailleurs, le Livret de développement durable et solidaire (LLDS) non plus. Il y a une étude publiée récemment, qui montre que seulement 30% à 40% des Livrets de développement durable et solidaire sont redirigés vers des entreprises responsables sur les questions environnementales et sociales. Vos livrets peuvent donc financer des énergies fossiles, même si souvent on l’ignore. C’est ce qu’on assure d’éviter chez Goodvest. En plus d’une rémunération supérieure. Je rappelle que l’inflation en France, en 2021, est attendue au-dessus de 2%. Cet été, elle est montée jusqu’à 3%. Quand vous placez votre argent sur un Livret A avec un taux de 0,5%, vous perdez 2,5% de pouvoir d’achat. 

Propos recueillis par Jonathan Baudoin

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