Diffusée sur Prime, la série documentaire consacrée à Orelsan revient sur la vie d’un garçon d’à côté qui fait mal au mic. Derrière la caméra, le petit frère assure – talent et amour fraternel à la ceinture – pour mêler l’intime au Label 5. Entre touche d’espoir et temps mort, le documentaire se distingue par sa justesse et sa douce mélancolie… 

Comment c’est bien. Merci à Clémentin Cotentin d’avoir collé aux basques de son grand frère pendant toutes ces années d’apprentissage et de galère. Merci à lui d’avoir pris la caméra pour suivre les pérégrinations de son aîné, qu’il pleuve ou qu’il neige. Et il flotte souvent en Normandie. Résultat, un documentaire sans prétention et 100 % addictif qui nous invite à rentrer dans le cercle fermé d’Orelsan, soit sa famille et quelques potes unis comme les sept boules de cristal. Il y a Skread, le taiseux talentueux, Ablaye, l’homme de l’ombre aux vibrations positives et les deux branleurs rappeurs que sont Gringe et Orelsan. Ce dernier veut percer dans le rap. Le talent est là, les moyens d’y parvenir un peu moins. Comment réussir dans ce milieu quand on vient de province ? Que les seuls rappeurs de l’époque viennent de Paris et sa banlieue ? Malgré tout, les quatre garçons pleins d’avenir s’accrochent, s’arrachent. Le documentaire raconte ce parcours semé d’embûches, de gueules de bois et de lendemains qui déchantent jusqu’au sacre de Bercy. Le charme réside dans ses images d’archives qu’on dirait sorties de l’émission Vidéo Gag, à ceci près qu’ici, le contenant s’offre un contenu réflexif sans ambiance sonore de fête foraine. Pour ceux qui ont eu la chance de voir l’excellent Comment c’est loin réalisé par Orelsan et Christophe Offenstein, la série se vit comme un bonus DVD de haut vol en 6 épisodes. On retrouve Orelsan-réceptionniste derrière son comptoir d’hôtel, Gringe collé au clic-clac et aux bancs de la fac, Skread et Ablaye en vaccin contre la procrastination. Chaque personnage se révèle sous un nouveau jour à l’image de Gringe, profond et sensible. Ablaye, l’ex-banlieusard au grand cœur débarqué dans le Calvados, sourit et soutient mordicus son frangin Orel’ quand le vent tourne. Fidélité, tel est le Master Word de ces mecs. En filigrane, un doc-générationnel cristallisant ce moment charnière entre les espoirs de l’adolescence et le passage à l’âge adulte, là où souvent les rêves se cognent à la réalité. Un documentaire empreint d’humilité loin des poncifs véhiculés par les success stories US crachant leurs dollars à la gueule du quidam. Ici, il n’est pas question de montrer ses couilles, d’afficher sa réussite. Ici, c’est Caen. 

Montre jamais ça à personne, Clément Cotentin, Prime Video 

Par David Xoual