Par Florence-Laetitia
Le 8 mars. Une journée de plus sur le calendrier pour certains. Une résonance particulière pour d’autres. Depuis des décennies, elle est ce murmure devenu cri, ce rappel que l’histoire s’écrit aussi au féminin. De Simone de Beauvoir, qui traçait les contours d’une liberté à conquérir, à Frida Kahlo, qui peignait ses douleurs comme d’autres dressent des cathédrales, les femmes ont gravé leurs voix sur les murs du temps.
Cette année, le 8 mars sera un regard. Ou plutôt trois. Trois femmes, trois visions du monde, réunies à la Galerie Damian Yee, au 26 boulevard Saint-Germain, Paris 5e, pour une exposition pensée par Sara Lî Costillas Borrione, de L’agence Sara Lî communication en collaboration avec Dorcite Mélé. Trois artistes qui, loin du vacarme, nous invitent à observer autrement.
Carolina R – L’image comme résonance
Il y a des artistes qui observent le monde, et d’autres qui le traduisent. Carolina Ritzler appartient à cette seconde catégorie. Hispano-polonaise née en France, elle façonne son art comme elle habite le monde : avec intensité, avec jeu, avec une fascination pour ce qui échappe au regard ordinaire. Designer, auteure, compositrice, interprète, elle ne cloisonne rien. Tout est dialogue, tout est mouvement.
La photographie, chez elle, n’est pas un arrêt sur image. C’est un passage, un souffle, une porte entrouverte vers une autre perception. Dotée de synesthésie, elle perçoit les couleurs comme des sons, les formes comme des mélodies. Le monde lui apparaît comme une immense scène de théâtre, où les ombres et les lumières se répondent dans une danse subtile.
Ce qui l’intéresse, ce n’est pas tant ce qui est montré, mais ce qui affleure, ce qui chuchote derrière l’évidence. Elle joue avec l’angle, avec la perspective, avec cette manière singulière de révéler l’invisible dans le visible. Ses images sont des énigmes délicates, des fragments de réalité où chacun projette sa propre histoire.
La série “Réflection” est un miroir tendu au spectateur. Elle ne livre pas de réponses, elle invite à la réflexion, à l’interrogation, à cette douce incertitude qui fait toute la beauté du regard. Car l’image, au fond, n’est jamais qu’une empreinte de ce que nous sommes prêts à y voir.
Vanessa Bosio – Photographier l’invisible pour lui rendre son poids
Vanessa Bosio ne regarde pas le monde, elle l’écoute. Elle scrute ce que l’on ne voit plus, ces fragments de réel laissés au bord de la route. Un chantier abandonné, un mur usé par le vent, une lumière hésitante au crépuscule. Ses photographies sont des haltes, des silences dans le vacarme, des souvenirs d’instants que personne n’a vraiment pris la peine de retenir.
Autodidacte, elle classe et reclasse ses images, bâtissant une cartographie de l’éphémère. Elle assemble des diptyques comme on compose une mélodie : un dialogue entre ce qui fut et ce qui persiste. Son travail, c’est la mémoire des espaces, des traces que l’on laisse sans s’en apercevoir.
En 2023, elle publie Archinaturelle, un livre qui dit tout de son regard. Un regard humble, patient, attentif au monde et à ses failles.
Alejandra Gómez – Rêver en couleurs, photographier les âmes
Alejandra Gómez est une voyageuse. Non pas dans l’espace, mais dans la mémoire. Colombienne et française, elle glisse entre les langues et les mondes, entre la photographie et la vidéo, entre le réel et la réminiscence. Ce qu’elle cherche ? Ce qui nous traverse et nous échappe à la fois.
Son art est fait de visages et de gestes, de couleurs qui vibrent comme un souvenir trop fort. Elle photographie l’empreinte laissée par un corps dans l’air, la lumière qui se pose sur une peau comme une caresse oubliée. Ses images sont des songes éveillés, des instantanés où la fiction et la réalité s’entrelacent sans jamais se départager.
Elle s’inspire de ses rêves, de ses blessures, de ces morceaux d’elle qu’elle dépose dans chaque cliché. Ses portraits ne racontent pas des histoires, ils les évoquent. Comme une musique qu’on aurait entendue dans une autre vie.
Pourquoi venir ?
Parce que le 8 mars n’est pas un simple jour, mais une vibration. Parce que ces trois femmes ne racontent pas seulement le monde : elles le réinventent. Parce que leurs images, une fois vues, s’accrochent au regard comme une phrase qu’on n’oubliera pas.
Alors, laissez tomber les slogans creux et les discours déjà entendus. Venez voir. Venez ressentir. Venez écouter ces trois voix qui, à travers la photographie, transforment le regard et réécrivent la liberté.
📅 8 mars 2025 – 17h à 21h
📍 Galerie Damian Yee, 26 boulevard Saint-Germain, Paris 5e