FEAT-Y : « L’Âme est la fille de l’Amour et de la Beauté ». Cette phrase de Khalil Gibran (L’œil du prophète,1991) s’accorde bien à vos autoportraits, troublants et poétiques. Pouvez-vous nous raconter la genèse de ce projet ?   

Jessica Pliez : « Enfant, mon arrière-grand-mère me faisait voir les albums de famille, et je rêvais de toutes ces personnes que je ne rencontrerai jamais, les « chers disparus », dont je retrouvais les traits sur mon visage. Je voulais rendre visite aux « chers disparus », et je pensais vraiment qu’ils habitaient un autre lieu où je pourrai aller les voir. C’est cette émotion par rapport au souvenir que je voudrais donner à voir. »

FEAT-Y :  Quel est votre projet artistique à travers ces autoportraits ?  

Jessica Pliez : « Ce qui compte pour moi, c’est l’invitation au dialogue imaginaire. Les interrogations du spectateur viendront du regard porté sur l’artiste qui se met en scène ; mais cela n’est pas l’important. Ma proposition c’est de se laisser aller à regarder l’autre dans sa profondeur. Ces autoportraits ressemblent peut-être à moi, mais si le spectateur fait le parallèle avec lui, il est prêt à s’ouvrir à lui-même.  Avons-nous des traits en commun ? et les réponses viendront du spectateur. Je suggère, comme à travers le voile de la mémoire, et le spectateur décide s’il veut aller plus loin. Je sais que je peux susciter la surprise, et je le vois, parfois, dans le regard de l’autre devant ces portraits. La mort est un thème qui revient souvent dans mon travail, mais elle n’est jamais triste ou laide ! 

La mort grave les souvenirs dans les cœurs de ceux qui se sont aimés. Elle est notre profondeur, la vie sous la forme d’une absence qui résonne et vous appelle à vivre encore. »

FEAT-Y :  Des œuvres uniques ? 

Jessica Pliez : « Ces portraits sont intemporels, ils sont des portes que nous pouvons ouvrir pour dialoguer ou pour écouter « avec les yeux ». Chacun vous racontera son histoire, pas toujours facile à entendre ou à accepter, ils parleront peut-être du passé, du futur, feront parfois peur, ou seront sympathiques, fous, désemparés…  Ils sont ce qu’on ne s’avoue pas, juste là, devant soi-même. Je transforme mes autoportraits pour exprimer mes sentiments. Quand le rendu me satisfait je prends un seul polaroid, une œuvre unique, que j’encadre et que j’offre au regard de l’autre. J’aime reprendre les mêmes portraits, sur la durée, pour les voir évoluer et changer, et je crois que mon projet ne s’arrêtera jamais ! » 

© FEAT-Y et François Beauxis-Aussalet 

Jessica Pliez est une artiste plasticienne qui vit et travaille à Clichy

Site web de l’artiste: https://jessicapliez.wixsite.com/jessicapliez 

Instagram: https://www.instagram.com/jessicapliez/  

Instagram dessins : https://www.instagram.com/jessica_pliez/ 

La Passagère, Polaroid 2018, collection privée

Noire patience, Polaroid 2018

Au revoir, Polaroid 2018, collection privée

A demi-mot, collection 2016

Poison, Polaroid 2017