Fréquemment associée  à des pertes de mémoire ou un état de démence, la maladie identifiée pour la première fois en 1901 par Alois Alzheimer, altère également  la condition physique et la qualité de vie des malades d’Alzheimer.

Les répercussions sont souvent méconnues et de ce fait la maladie est, dans une majorité de cas, mal  prise en charge. Les malades atteints d’alzheimer vivent une altération de leur rapport au temps et aux autres. La perte d’autonomie devient inévitable au fur et à mesure de l’avancement de la maladie.

 L’ISA et la maison des sages, sont partis de ce constat, et ont choisi d’apporter une solution alternative. L’idée est simple : rendre leur dignité à ces personnes malades à travers la création de lieux dont la priorité est d’y créer de la vie, du lien, et un accompagnement 24/24 adapté. 

Frédéric Boudet nous a expliqué avec passion ce projet solidaire,qui est une avancée pour les 1 200 000 malades que comptabilise la France. 

Pourriez-vous nous expliquer ce concept de colocation née d’une collaboration entre L’ISA et la maison des sages ?  

Un médecin et un formateur en gestion de la maladie d’Alzheimer sont à l’origine de la création du fonds de dotation de la maison des sages. Lors d’un colloque, ils ont découvert  la présentation d’un modèle qui existe en Allemagne depuis 1992 sur l’habitat partagé accompagné. Ils ont pensé que c’était exactement le modèle à suivre. Le fonds a pu être créé,  par la suite,  à partir de subventions venant de Malakoff Médéric, Klésia  et la fondation bettencourt, avec pour but de développer ce modèle en France. Il y a déjà 4000 maisons de ce type là en Allemagne. 

La superficie des  maisons s’élève de  300 à 400 M2 afin de disposer de parties communes assez spacieuses. Elles comprennent  8 chambres de 20 m2. Les colocataires emménagent avec leurs propres meubles, ce qui évite le déracinement par rapport à leur ancien lieu de vie. Le reste des espaces sont partagés.  Le  point impératif pour les maisons, c’est l’obligation de comprendre un jardin. Les malades d’Alzheimer sont hyperactifs, et le jardin leur permet de sortir dans un espace extérieur sécurisé et également d’avoir une activité comme le jardinage en extérieur. 

La maladie d’alzheimer c’est 1 200 000 personnes, pourriez vous nous expliquer les symptômes et conséquences liés à cette maladie? 

Alzheimer, C’est 200 000 nouveaux cas par an et c’est la 4e cause de mortalité en France. C’est 25% de famille qui sont touchés par la maladie.  Aujourd’hui, il n’existe aucun traitement. La partie immergée de l’iceberg, c’est la perte de mémoire. Mais c’est également, beaucoup de crises d’angoisse accompagnée de phénomènes de violence psychique ou physique sur les aidants. Un malade est conscient de sa maladie et cela l’angoisse. C’est pour cette raison qu’à partir d’un certain moment, il devient difficile de les laisser seuls chez eux sans les mettre eux-mêmes ou le voisinage en danger.

Il y a également avec le temps  une perte de coordination 

Frédéric Boudet : Directeur Général L’ISA – Alice Moll-Bocherel Présidente L’ISA – Alexandre Schmitt Manager & Cofondateur La Maison des Sages

Ces colocations permettent de redonner de la dignité à ces personnes et de recréer du lien, sans vos maisons comment sont prises en charge les personnes atteintes d’Alzheimer ? 

Aujourd’hui, lorsque vous êtes  diagnostiqué Alzheimer,  il n’ y a pas vraiment de choix. Soit vous restez seul chez vous avec le problème d’une progression plus rapide de la maladie due à l’absence de lien social. Soit vous êtes en couple,et  la personne en bonne santé va s’épuiser à essayer de soigner son conjoint. Et le gros problème de cette maladie, c’est lorsqu’elle gagne du terrain , on ne peut plus laisser la personne seule chez elle.  Et la, soit la famille se relaie la nuit , soit ils paient une assistance de nuit. Mais en termes de tarif , on est sur un budget avoisinant les  12 000 euros par mois , ce qui est ingérable dans 95% des cas. L’alternative devient alors L’ehpad, mais trouver de la place s’avère compliqué et les ehpad n’ont pas d’unité spécialisée dans la gestion de cette maladie qui nécessite une attention particulière. La résultante est alors une surdose de médicaments qui accentue la maladie.

Au sein de vos colocations, comment s’organise la vie ?

Les colocataires vont être comme chez eux en fait , excepté qu’il y a 2 auxiliaires de vie présentes en permanence . Cette présence est rendue possible par la mutualisation des coûts. Ainsi, ils ne sont jamais seuls. Notre développement se fait essentiellement en milieu urbain car ce sont les zones où les gens se sentent le plus isolés. En restant près des villes, cela permet également aux familles de pouvoir venir plus régulièrement. 

Chaque jour, il y a des ateliers cognitifs qui permettent de maintenir au maximum leur autonomie. Et chacun participe en fonction de ses capacités à la vie de la maison. Par exemple, le repas est l’activité principale de la journée. Ils font leurs courses avec un accompagnant, puis  ils préparent les repas, sans toucher aux matériels dangereux pour faire la cuisine. Ils se sentent utiles, mangent sainement, concourent donc à leur bien-être. 

Les colocataires de la maison des sages de Versailles

Avez-vous pu observer des transformations chez certains des résidents ? 

Nous avons ouvert la première maison en 2019, les gens étaient stressés et avaient énormément de crises d’angoisse. On s’est aperçu que même avec le contexte actuel du covid, ils n’en avaient plus ou très peu.  La plupart en arrivant étaient en phénomène d’anorexie, et ils ont en moyenne pris entre 3 ou 4 kilos. Ce qui est un signe de bonne santé 

Ne pensez-vous pas que ce genre de structure devrait se développer pour nos aînés au vu du contexte actuel?

Tout à fait. C’est la raison pour laquelle je me suis lancé dans cette aventure. Je suis convaincu que l’avenir pour les anciens, c’est ce type de maison. D’abord pour les communes, cela évite de démolir de belles maisons de caractère et de construire des constructions impersonnelles à la place. d’autre part, les pensionnaires participent à l’économie locale. Et surtout, ils sont chez eux. 

On recrée du lien social, on a remarqué qu’ils s’entraident entre eux. Par ex, un des pensionnaires a des problèmes d’arthroses, et sa voisine tous les matins l’aide à mettre sa veste.

Quelles sont vos perspectives d’ouvertures concernant ces maisons? 

On démarre.  Mais nous sommes sur un rythme de 2 par an durant les 2 premières années. Et après nous souhaitons passer à 4 par an. A l’heure actuelle, nous sommes sur Versailles, mais nous visons le grand Paris puis dans un deuxième temps, toutes les grandes métropoles françaises. Notre but étant de rompre l’isolement des gens qui sont seuls en ville. 

le doyen fêtant ses 92 ans

Avez-vous une anecdote concernant des résidents d’une de vos maisons?

 Avant le Covid, nous avons fêté les 92 ans de notre doyen. Ses colocataires lui ont préparé un gâteau en cachette afin de lui faire une surprise . Ils ont également organisé une fête déguisée sur la thématique des années 30.  Tout le monde était déguisé. Et ce qui était extraordinaire, c’est que nous n’avions plus l’impression que nous étions avec des malades. 

Mais si je dois retenir une chose, c’est qu’ils ne se connaissaient pas en arrivant en 2019  , et quand on les observe, ils donnent cette impression de se connaître depuis toujours. La colocation dégage un parfum de sérénité et le comble, c’est qu’ils arrivent  souvent à nous faire oublier qu’ils sont malades.

Atdl

Lien de la campagne Zeste:

https://www.zeste.coop/fr/Maison-Solidaire-Alzheimer