Par Florence-Laetitia

48 vêtements achetés par an et par habitant en France. Plus de 100 milliards écoulés dans le monde chaque année. Le constat est accablant : jamais l’industrie textile n’a produit autant, aussi vite, aussi loin de toute considération écologique ou sociale. Ce mardi 10 juin 2025, le Sénat a dit stop. À l’unanimité, il a adopté la proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de la mode express, un modèle économique fondé sur la surproduction, l’obsolescence programmée des tendances, et l’effacement du bon sens. Rapportée par la sénatrice Sylvie Valente le Hir au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, cette loi entend poser un cadre inédit à une industrie en roue libre. Elle impose des règles strictes : encadrement des renouvellements ultra-rapides de collections, interdiction de la publicité pour ces pratiques, et mise en place de messages d’alerte sur les plateformes, informant les consommateurs de l’impact environnemental et social de leurs achats.

Dérégulation textile : la contre-attaque législative

Mais le texte ne se limite pas à éteindre les vitrines criardes de la fast fashion. Il s’attaque au cœur du modèle : les volumes mis sur le marché. En encourageant le réemploi, la réparation, la transparence et la responsabilité, il renverse la logique d’un système où le vêtement se consomme comme un gobelet jetable. Les influenceurs, devenus vitrines commerciales de la surconsommation, sont désormais tenus à l’écart : ils ne pourront plus promouvoir ces marques qui polluent à bas prix. Plus encore, la loi introduit une modulation affinée des éco-contributions : les vêtements les plus responsables paieront moins, les plus polluants plus, mais dans un esprit d’équilibre, non de sanction automatique. Le Sénat a aussi recentré les investissements sur le territoire national, en fléchant les contributions vers les infrastructures de recyclage françaises. Dans un monde où les déchets textiles de l’Occident étouffent déjà les décharges d’Afrique et d’Asie, ce recentrage est un geste politique fort. Ce texte marque un virage. Il transforme un constat écologique en outil législatif. Il rappelle que ralentir n’est pas un luxe, mais une nécessité. Et que dans l’urgence climatique, même la mode n’est plus un terrain neutre.