Heide Baumann : « C’était pour moi un défi de fonder une marque éco-responsable »

Est-ce possible de développer une marque de vêtements en se montrant éco-responsable ? Pour Heide Baumann, fondatrice de la marque Aatise, c’est un défi qu’elle relève volontiers depuis mai 2017, estimant que cette alternative permet une meilleure adaptation à la demande, en limitant au maximum le problème de surstock et se donnant les moyens d’innover, avec des matériaux recyclés, susceptible de convaincre la clientèle. Tout comme le fait de produire en France et d’être transparent sur les coûts de fabrication. Interview.

Feat-Y : Comment avez-vous choisi d’appeler votre marque Aatise, que signifie ce nom ?  Pourquoi êtes-vous tournée vers un positionnement éco-responsable ?

Heide Baumann : Le nom Aatise vient d’un dictionnaire du Moyen-Âge et signifiait défi, gageure. C’était pour moi un défi de fonder une marque éco-responsable. Je me suis dit que le nom était alors tout trouvé. C’est vrai qu’il est difficile de trouver un nom de marque original qui ne soit pas déjà pris, vu ou entendu. L’éco-responsabilité était pour moi le point central, je pense qu’aujourd’hui on ne peut plus faire de marques de vêtements autrement, il est important d’agir pour la planète. Je ne conçois plus la fast-fashion qui exploite les ouvriers à l’autre bout de la planète, utilise des matières qui viennent d’encore plus loin et qui utilise des produits chimiques impossibles à recycler. Ça m’est impensable pour ma marque et dans ma consommation.

Feat-Y : Comment vous est venu l’idée de créer une gamme de vêtements personnalisable par le client ?

H.B : Je travaillais dans la « fast-fashion » et j’ai fait face à des problèmes de stock, de surstock. Aujourd’hui, la culture des soldes est devenue tellement importante que les marques doivent vendre toujours plus pour rentabiliser leurs promotions « exceptionnelles ». Malgré les promotions tous les stocks de sont pas toujours écoulés, il faut alors s’en débarrasser voir les détruire. Pour éviter cela, il n’y a qu’une seule solution, c’est la fabrication à la demande. C’est-à-dire que le vêtement est fabriqué uniquement lorsqu’il a été acheté. En faisant de la fabrication à la demande on peut se permettre d’avoir plusieurs options comme celles que l’on propose, par exemple le choix du tissu, de la forme, etc… Cela permet à chacun de penser son achat pour le garder le plus longtemps possible. C’est un élément d’éco-responsabilité en plus.

Feat-Y : Vous indiquez faire une production made in France. Est-ce à dire que tous les matériaux utilisés pour la conception des vêtements viennent de France et pourquoi une production hexagonale ?

H.B : Il faut séparer deux choses. Même pour une marque reconnue made in France, le coton ne vient pas de France car il n’existe pas de coton français. Les matières sont alors souvent fabriquées à l’étranger. En plus le coton a besoin de beaucoup d’eau et sa transformation aussi. Nous par exemple, pour éviter le coton nous utilisons du Lyocell qui est fabriqué par une société européenne. Il n’y a pas d’équivalent en France. J’essaie au maximum de faire en sorte que ce soit éco-responsable. Mais les matières, faute de moyens, ne sont pas toutes françaises. Le lin, pour les t-shirts, est fait entièrement en France, à part la filature qui part chez une société française en Pologne, dans sa filiale, pour être filée car il n’en existe pas en France. Toutes nos matières sont européennes. Ce qui est déjà bien. 

Feat-Y : Sur votre site, vous indiquez les différents coûts pour la production d’un vêtement. Pensez-vous que cette démarche de transparence peut convaincre les clients potentiels sur l’achat de vos fabrications ?

H.B : C’est un élément effectivement. Ça aide les clients à mieux comprendre nos prix et notre démarche mais ce n’est pas le seul. Il y a aussi les motifs, les matières, etc… Ce n’est pas l’élément déclencheur, je pense.

Feat-Y : Quels sont vos objectifs de développement pour vous collections ?

H.B : Nous comptons toujours faire appel à des matières encore plus éco-responsables. C’est surtout cette quête-là qui est difficile mais intéressante.

Feat-Y : D’où vous vient l’inspiration pour créer vos collections ? 

H.B : Nous ne fonctionnons pas avec des collections. Ce mot-là, je le bannis de mon vocabulaire parce que les collections sont faites pour dire : « à la fin d’une collection, il faut solder. Les vêtements sont périssables, etc… ». Nous, nous utilisons le même tissu jusqu’à ce qu’il soit épuisé. Ensuite nous pouvons rajouter d’autres tissus qui sont choisis dans notre communauté via Instagram ou d’autres. Ce n’est pas une inspiration individuelle, mais plutôt collective.

Feat-Y : Si vous étiez un livre, lequel seriez-vous ?

H.B : Le Comte de Monte-Cristo, d’Alexandre Dumas. Je l’ai lu deux ou trois fois. Je trouve l’histoire bien faite, captivante.

Feat-Y : Si vous étiez un paysage, ce serait lequel ?

H.B : La forêt amazonienne, par exemple, avec beaucoup de pluie, beaucoup de vie.

Feat-Y : Si vous étiez un matériau ou un tissu utilisé par votre société, ce serait lequel ?

H.B : Ce serait notre matière Lyocell et le coton recyclé, que nous utilisons pour nos pantalons. Le Lyocell est naturel car à base de pulpe de bois et il est déjà mélangé avec du coton recyclé lors de la fabrication du fil. En plus au moment du tissage nous ajoutons encore 25% de coton recyclé. Les deux respectent toutes nos exigences d’écoresponsabilité et forment un tissu résistant et doux au toucher. 

Feat-Y : Si vous étiez un animal, lequel seriez-vous ?

H.B : Un oiseau. Parce qu’il sait voler et que j’ai toujours voulu voler.

Propos recueillis par Jonathan Baudoin

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